IP/98/867
Bruxelles, le 7 octobre 1998
La Commission prend des mesures pour réduire les émissions de dioxines des installations d'incinération de déchets
La Commission européenne a adopté une proposition de directive relative à l'incinération des déchets. Cette directive limite les émissions de tous les polluants dangereux, notamment les dioxines et les furanes, ainsi que des métaux lourds. La mise en œuvre de toutes les exigences de la proposition permettrait de réduire l'ensemble des émissions de dioxines et de furanes provenant de l'incinération des déchets municipaux et hospitaliers et des boues d'épuration à environ 11 grammes par an d'ici à 2005, même en tenant compte de l'augmentation prévue du volume de déchets incinérés.
Cela représenterait une diminution de plus de 99 % des émissions par rapport au niveau de 1994, et l'objectif de 90 % de réduction énoncé dans le cinquième programme d'action en matière d'environnement pourrait alors être atteint. La proposition fixe également des limites strictes en matière d'émission pour le mercure et le cadmium, ainsi que pour certains gaz acides et elle contient des dispositions relatives à la coincinération.
Afin de combler les lacunes de la législation existante, la directive proposée à l'initiative de Mme Ritt Bjerregaard, membre de la Commission chargée de l'environnement, vise à introduire des mesures de contrôle pour l'incinération de la plupart des déchets qui ne sont pas couverts par la directive 94/67/CE concernant l'incinération des déchets dangereux JO L 365 du 31.12.1994..
Elle couvrira donc les déchets municipaux, les déchets dangereux exclus du champ d'application de la directive 94/67/CE, tels que les huiles usagées, les solvants et les déchets hospitaliers ainsi que d'autres déchets non dangereux. La distinction entre les déchets dangereux et les déchets non dangereux se fonde principalement sur des considérations relatives à la gestion et à la manipulation des déchets plutôt que sur les caractéristiques de l'incinération.
Les déchets non dangereux peuvent contenir des composés qui, pendant leur incinération, entraînent la production de substances polluantes atmosphériques dangereuses et qui peuvent prendre la forme de nombreuses substances identiques à celles présentes lors de l'incinération de déchets dangereux.
Il est établi que l'incinération de déchets constitue la plus importante source d'émissions atmosphériques de dioxines et de furanes en Europe. Les dioxines sont considérées comme les plus toxiques des substances produites par l'homme. La plus toxique d'entre elles, la tétrachlorodibenzodioxine, est un agent cancérogène connu pour l'homme.
Les composés sont à l'origine de l'acné chlorique qui se développe à la suite d'expositions importantes et il semblerait qu'une série d'effets non cancéreux surviennent à des niveaux d'exposition chronique extrêmement bas, notamment des effets nocifs sur la reproduction, des répercussions sur le développement du fœtus à naître et des dégradations des facultés mentales.
Le total des émissions dans l'atmosphère provenant de l'incinération des déchets municipaux et hospitaliers se monte à environ 2300 grammes par an dans l'Union européenne.
La proposition de directive prévoit une valeur limite d'émissions de 0,1 nanogramme (10-9 g) 10-9 g - 0,000 000 001 g, soit 1 mm de la distance séparant Bruxelles de Vienne.par mètre cube pour les gaz résiduaires dans la cheminée des incinérateurs, alors que les émissions représentent actuellement, dans l'Union européenne, jusqu'à 100 nanogrammes par mètre cube.
Si les rejets des autres sources de dioxines et de furanes restent au même niveau, la part due à l'incinération de déchets municipaux et hospitaliers dans le total des émissions sera ramenée de 40 % à 0,3 % seulement.
Des études récentes ont montré que les émissions provenant des incinérateurs de déchets représentent 36 000 kg de mercure et 16 000 kg de cadmium par an dans l'UE.
La mise en œuvre de la directive proposée permettrait de réduire le total estimé des émissions de mercure et de cadmium provenant de l'incinération des déchets municipaux et hospitaliers et des boues d'épuration à respectivement 7,1 tonnes par an et 1,1 tonne par an. On a établi qu'il existe des liens entre l'exposition au cadmium et le cancer du poumon et les lésions rénales. Il a également été prouvé que l'exposition au mercure peut avoir un effet néfaste sur le système nerveux et les reins et provoquer des lésions fœtales.
La proposition de directive devrait aussi permettre de réduire notablement les émissions de gaz acides tels que le HCl, le NOx et le SO2. Ces mesures de limitation contribueront au respect des objectifs fixés en matière de qualité de l'air et garantiront que l'incinération de déchets non dangereux n'aggrave pas de manière significative les problèmes planétaires et régionaux d'acidification et de destruction de l'ozone troposphérique.
Enfin, la proposition de directive contient des dispositions relatives à la coincinération, technique qui consiste à utiliser des déchets comme combustible habituel ou d'appoint dans des installations dont l'objectif essentiel est la production d'énergie ou de produits matériels.
Informations connexes
Impact des polluants dus à l'incinération des déchets
L'incinération des déchets peut donner lieu à des émissions de polluants dans l'air, l'eau et le sol. Les polluants rejetés dépendent à la fois de la technologie employée et des déchets traités. Les émissions dans l'atmosphère peuvent comprendre des gaz acides, des particules, des métaux lourds et des composés organiques hautement toxiques à l'état de traces.
La proposition de directive a été motivée, à l'origine, par l'inquiétude que suscitent les émissions de métaux lourds, de dioxines et de furanes, et les mesures proposées auront une incidence significative sur ces émissions. Cependant, il est désormais manifeste que les émissions d'autres polluants toxiques peuvent et doivent être considérablement réduites.
Volume de déchets incinérés
Le volume de déchets incinérés dans l'UE va probablement augmenter dans les années à venir. Ainsi, on s'attend à ce que la quantité de déchets municipaux incinérés dans l'Union passe de 31 millions de tonnes par an en 1990 à 56,5 millions de tonnes par an en 2004. Cette évolution est due à l'augmentation de la quantité de déchets produits et à la diminution du volume de déchets acheminés vers les décharges.
Il faut également s'attendre à un fort accroissement du volume des autres types de déchets destinés à être incinérés. L'interdiction de l'immersion en mer des boues d'épuration, ainsi que l'augmentation de la production de boues découlant de la mise en œuvre de la directive concernant les eaux résiduaires urbaines conduiront à des investissements considérables dans de nouvelles installations d'incinération à l'intérieur de l'UE. En l'absence de mesures efficaces de contrôle des émissions de polluants, ces augmentations risquent d'amplifier encore les effets sur l'environnement.
Coûts et avantages
Parmi les avantages de la directive, il faut citer la réduction des effets néfastes sur la santé humaine et sur l'environnement, ainsi qu'une diminution des autres incidences de la pollution, tels que les dommages causés aux cultures ou aux bâtiments.
Les coûts comprendront les dépenses en capital supplémentaires nécessaires à la mise en place ou à la modernisation des équipements antipollution et les dépenses de fonctionnement supplémentaires dues au renforcement de la surveillance de l'environnement ou à une utilisation accrue de produits chimiques dans le système de traitement des gaz de fumées. Ces coûts supplémentaires seront d'abord à la charge des exploitants d'installations. Toutefois, ils seront progressivement répercutés sur les utilisateurs, directs ou indirects, de ces installations, à savoir les municipalités et les contribuables.
On a procédé à une évaluation économique des coûts et des avantages des mesures de contrôle proposées en ce qui concerne les déchets municipaux solides, les déchets hospitaliers et les boues d'épuration pour l'UE dans son ensemble. Les coûts ont été estimés à environ 550 millions d'écus par an, et les avantages à 810 millions d'écus par an, soit un bénéfice net de 260 millions d'écus par an.
Ces avantages tiennent principalement aux améliorations sur le plan de la santé qui résulteraient d'une réduction de la pollution. Cette estimation ne tient pas compte d'éventuels effets à long terme de la pollution atmosphérique. Les avantages réels pourraient donc être beaucoup plus importants.
Une autre étude, portant sur les fours à ciment, a été effectuée pour tenir compte des particularités inhérentes à ce secteur d'activité. Elle n'a pas calculé les coûts et avantages totaux pour l'ensemble de l'UE mais plutôt les coûts et avantages estimés pour un certain nombre de fours à ciment représentatifs. Il a été établi que, dans tous les cas, les avantages étaient au moins cinq fois plus importants que les coûts estimés, même en se fondant sur une estimation des bénéfices modeste.
La coincinération
Ces dernières années, la coincinération de déchets dans les installations industrielles a sensiblement augmenté. Cette technique consiste à utiliser des déchets comme combustible habituel ou d'appoint dans des installations dont l'objectif essentiel est la production d'énergie ou de produits matériels.
L'utilisation de certains déchets pour répondre à une partie des besoins en énergie de certains processus industriels s'est considérablement développée. Les développements les plus importants sont l'utilisation de déchets tels que les pneus, les résidus de solvants et les huiles usagées dans les fours à ciment et la combustion de déchets tels que les boues d'épuration dans les centrales thermiques classiques.
Les mesures de contrôle des émissions des installations de coincinération ont suscité une inquiétude considérable dans l'opinion publique et la directive 94/67/CE du Conseil concernant l'incinération des déchets dangereux contenait des dispositions relatives à la fixation de valeurs limites d'émission pour les installations pratiquant la coincinération de déchets dangereux.
Cependant, la coincinération de déchets non dangereux n'est pas couverte, actuellement, par la législation communautaire existante. Si les mesures de contrôle relatives à la coincinération ne sont pas suffisantes, on peut se trouver confronté aux problèmes qui se sont posés avec des installations d'incinération spécialisées soumises à des mesures de contrôle inadéquates. La directive tient compte du vide réglementaire existant et vise à faire en sorte que la coincinération ne constitue pas un secteur faible du point de vue réglementaire et dans lequel les niveaux de protection de l'environnement pourraient être moins élevés.
En outre, l'absence d'un système cohérent de contrôle des conditions d'exploitation des installations ou des émissions dues à la coincinération de déchets non dangereux dans l'UE peut conduire à la pratique indésirable de mouvements transfrontières de déchets en provenance de régions soumises à des contrôles stricts vers des régions où les exigences en matière de protection de l'environnement sont moins élevées. La directive présente une méthodologie détaillée visant à déterminer les valeurs limites d'émission et les paramètres d'exploitation applicables aux installations de coincinération, afin de garantir des niveaux élevés de protection de l'environnement qui soient harmonisés dans toute l'Union européenne.